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Le plaisir féminin a été occulté par la science pendant des siècles. Selon le sexologue Sébastien Garnero : « Auparavant, dans toutes les traditions monothéistes il fallait contrôler les corps et la sexualité, elle était envisagée uniquement pour la reproduction. Alors que la particularité de la sexualité humaine, contrairement à la sexualité animale, c’est qu’elle est à 95% basée sur le plaisir. Il y a cette différence fondamentale ».

 

Une indifférence donnant naissance

à une méconnaissance

Dans l’histoire, les croyances et la méconnaissance de l’anatomie féminine par les hommes et les femmes ont contribué à maintenir des inégalités en matière de sexualité. Dès lors, le plaisir féminin est devenu un véritable enjeu et un combat féministe. Par exemple, « Une croyance a longtemps persisté, celle qui consiste à dire qu’il existe deux orgasmes, l’un vaginal et l’autre clitoridien, alors qu’ils proviennent tous deux de la stimulation du clitoris. », ajoute le sexologue.


Clémentine Bille, journaliste chez Cosmopolitan, révèle que : « La première échographie du clitoris a été faite en 2010. Cela a permis de montrer comment fonctionne l’orgasme féminin, de connaître davantage le corps de la femme et la construction de paroles légitimes. » Cette avancée souligne un retard considérable de l’intérêt que l’on portait au fonctionnement du plaisir féminin, ce qui a empêcher les femmes d’atteindre l’orgasme.


 

E N Q U Ê T E .  2

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I N D I F F É R E N C E   E T   T A B O U   A U T O U R   D U

P L A I S I R    F É M I N I N 

 

En 2010, la première échographie du clitoris a vu le jour, reflétant ainsi l’indifférence à l’égard de cet organe. Ce silence a donné lieu à de nombreux tabous sur le plaisir féminin, dont la prise de parole a été contrainte durant de nombreuses années.

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Un tabou autour du corps

et du plaisir féminin

 

Julia Petri, autrice du livre «  le petit guide de la masturbation féminine » a regroupé 6.000 témoignages de femmes. Au moment de choisir le titre, elle a été contrainte par les éditeurs français à cause de son titre.  Clémentine explique que : « Ils trouvaient des excuses pour faire disparaître le mot « masturbation » dans le titre du bouquin, puis elle a décidé de faire de l’auto-édition. C’est d’ailleurs ce qui la fait connaître.» Elle poursuit qu’il s’agit d’une expérience «  qui montre encore que le plaisir féminin est malheureusement une source importante de tabous. » 

 

Le hors-série " Plaisir Féminin " de ChEEk Magazine, en collaboration avec les Inrockuptibles, sorti le 7 Février 2020, comporte deux versions de couvertures et expose deux femmes en lingerie. Comme l’explique Myriam Levain, la rédactrice en chef : « Nous avions un problème pour communiquer sur les réseaux sociaux. Une de nos couvertures dévoile la moitié d’un téton. On a été bloqué et on a dû mettre un emoji par-dessus. Les buralistes étaient gênés par les couvertures alors qu’ils vendent du porno depuis des lustres ! Les photos sont très esthétiques, on ne voit rien, c’est juste suggéré, et ça a gêné les kiosquiers. » Ce constat montre que le problème ne vient pas seulement de la nudité des corps puisque la presse pornographique a toujours existé, mais bien du « Plaisir féminin » qui semble offenser.

 

La co-fondatrice du magazine ajoute qu’il existe des tabous autour de la masturbation, mais aussi de la sodomie : « C’est un des thèmes dont il n’est pas si facile de parler, probablement parce que c’est une des pratiques qui n’est pas liée à la procréation. Mais la génération qui a 20 ans aujourd’hui est quand même plus à l’aise avec les pratiques sexuelles. Même si cette génération a grandi avec Youporn, et que ça pose d’autres problèmes de représentations de la sexualité. » 

Une représentation diversifiée

 

La direction artistique de ChEEk a opté pour deux photos de couvertures pour faire apparaître la diversité de couleurs et de corps « dans la perspective de faire changer les représentations » comme l’explique Myriam Levain. « Le but était de ne pas avoir un mannequin blanc qui fait du 34, comme ce que l’on voit d’habitude. On a fait plusieurs essais, au final il y a deux photos qui sont ressorties, mais comme elles nous plaisaient toutes les deux et qu’on n’arrivait pas à départager, on s’est dit que c’était tout à fait possible de faire deux versions. »

 

 

 

Si les jeunes sont de plus en plus ouverts sur certains sujets, grâce à une meilleure éducation, le sexologue Sébastien Garnero s’inquiète de l’impact de cette prise de parole sur la sexualité masculine. Selon Myriam Levain, « Parfois en voulant se libérer d’une injonction, on en créer une nouvelle. » 

 

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